Cuisines du monde

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Claude
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Cuisines du monde

Message par Claude » 16 déc. 2018, 20:52

Une histoire qui m'a plu.

FOOD

CAFÉ DU NORD :
«IL CUISINE TOUTES LES ÉPICES DU MONDE, NOUS, C’EST AIL, THYM»


Par Jacky Durand Envoyé spécial à Arnay-le-Duc (Côte-d’Or)
— 14 décembre 2018 à 18:06

Il y a trois ans, le petit bistrot rural d’Arnay-le-Duc, en Côte-d’Or,
a embauché Ayman, un réfugié érythréen passé par le Soudan puis Calais.
Un mariage réussi, puisqu’il en est devenu le chef en janvier dernier.



On ne vous fera pas de dessin, mais c’est souvent autour de Noël et de la fin de l’année que ça rode. Quand revient ce drôle de sentiment, tendre et mélancolique, que l’on est tous né d’un quelque part que l’on traîne dans notre sac à dos de vie où il y a toujours une poche bien remplie : la bouffe. Elle résonne dans la mémoire pour le meilleur et pour le pire. Tiens, la coquille de poissons et de fruits de mer gratinée du réveillon, ça c’est du souvenir enluminé, celui des beaux jours et de la bonne cuisine sur la nappe brodée du trousseau de la daronne sur laquelle on dépose aujourd’hui nos Saint-Jacques juste saisies à la poêle. Car dans le sac à dos du mektoub, il y a aussi cette bouteille à la mer qu’est la transmission. Au gré des vents de nos saisons psychiques, elle échoue sur un coin de fourneau où l’on mitonne des châteaux de sable de goûts.

Mais la bectance, c’est comme les giboulées de printemps, derrière le grand soleil il y a toujours une embuscade de nuages noirs. A chaque fois qu’il est question de guerre, de dictature, d’épuration ethnique, de misère, de pauvreté, la bouffe finit par vibrer dans ces destins déracinés. C’est déjà une nécessité vitale, celle du corps bien sûr. Mais c’est aussi une façon de se raccrocher au désir de vie. Il suffit parfois d’un rien pour faire partager un peu de soi, par-delà les frontières, les mers et la diversité des cultures.


On pense à tout cela, l’autre jour, en remontant les ruelles pavées d’Arnay-le-Duc (Côte-d’Or), un bourg de 1 500 habitants posé entre l’Auxois et le Morvan. C’est que l’on a rendez-vous avec Aymad Marmouhd Madany, 40 ans, né en Erythrée, dictature oubliée. Réfugié et titulaire d’une carte de séjour de dix ans en France, il est cuisinier en CDI au café du Nord, où l’on aime venir manger l’œuf en meurette, ce triptyque savoureux de la cuisine bourguignonne avec au centre le jaune gourmand et coulant cerné par le blanc et entouré de la sauce au vin. En parler, c’est déjà saliver.

Maison de tolérance

La première fois que l’on a entrevu le café du Nord, c’était peu avant sa réouverture, à l’orée de l’été 2012. Avec la magnifique typo de l’enseigne en lettres brunes sur fond bistre, le camaïeu de gris de ses murs et de son plafond en caissons, le carrelage moucheté, les grands miroirs ourlés de laiton et ses banquettes rouges, ce rade flamboyant et séculaire s’était endormi à la mort de son ancien propriétaire. Une tribu a décidé de le faire revivre : Sonia et Jean-François Cautain, un couple baroudeur passé par l’humanitaire et la diplomatie, ont fourni l’artiche, Valérie Boudot, une Bourguignonne née en Algérie s’est mise aux fourneaux et au comptoir tout en recrutant une escouade de filles. Le tout mijotant via Skype entre Arnay-le-Duc et Islamabad (Pakistan), où Jean-François Cautain est ambassadeur de l’Union européenne.

Les racines n’ayant pas de frontières, le café du Nord a ressuscité en un caravansérail où se brassent tous les goûts et toutes les couleurs, à l’image de la carte et des menus : l’œuf poché sauce époisses croise le brick au jambon du Morvan, les falafels et le jambon persillé. Et parce que bouffer, c’est revendiquer, le café du Nord fait la part belle aux produits locaux (pommes de terre, escargots, fromage de chèvre, volaille…) et déborde d’activités culturelles, récréatives et militantes qui en font une bonne maison de tolérance : séances dîner-ciné (12 euros), veillées en patois, débats, soirées music-hall, repas afghan et rencontre avec la Cimade (l’association de soutien aux migrants), activités avec l’épicerie d’Arnay dans le cadre de l’opération «Gardons le moral, consommons local»…

En 2015, le café du Nord est à la recherche d’un cuisinier, ce qui n’est pas une mince affaire en zone rurale et dans une profession confrontée à un turnover et à une pénurie importants. L’équipe, qui croit en la solidarité et l’insertion par la bectance, se tourne vers le centre d’accueil temporaire - service de l’asile (AT-SA) qui vient d’ouvrir à Pouilly-en-Auxois (Côte-d’Or), à 17 kilomètres d’Arnay-le-Duc. Installé dans une ancienne caserne de gendarmerie, il accueille une quarantaine de migrants venus du Soudan, d’Erythrée, du Tchad, du Congo ou d’Irak qui avaient échoué dans la «jungle» de Calais.

Ayman est l’un d’eux. Né en Erythrée, il a occupé différents jobs dans des hôtels et des restaurants de Khartoum, la capitale du Soudan… «On était très émus quand on nous l’a présenté, raconte Sonia Cautain. On se demandait ce qu’on allait faire, quelle cuisine on allait faire ensemble. Ayman n’avait pas le permis, son français était incertain. Il fallait qu’on le loge. Il s’est retrouvé aux fourneaux avec Valérie [Boudot]. Il a tout de suite été en confiance avec nous. Il n’y avait aucun doute d’un côté comme de l’autre.»

Périple

Commis, puis second, Ayman est le chef du café du Nord depuis janvier dernier. Quand on s’installe près de lui pour le service du soir (22 réservations), il sourit doucement en préparant une tarte aux champignons, à la courgette et au fromage de chèvre. De son enfance à Tenesey, une petite ville de l’ouest de l’Erythrée, il évoque le mouton aux gombos de sa mère en rangeant ses boîtes de cumin, de coriandre et de curry. «Il cuisine toutes les épices du monde, alors que nous, c’est ail, thym, sel et poivre», sourit Sonia Cautain. Ayman est aussi un sorcier des viandes, en rendant le porc et le sauté de veau si tendres qu’on peut les manger à la cuillère, comme un gigot de sept heures. «Il fait un rôti de porc à l’époisses phénoménal», répète-t-on au café du Nord.

Du périple qui l’a conduit du Soudan à la Bourgogne, il ramasse sobrement quelques mots : «La Sicile, Vintimille, Nice, Calais, je voulais aller en Angleterre.» Avant, il est passé par la Libye. «Deux mois.» Silence. Ayman coupe des tomates, émince des oignons et écrase des gousses d’ail. «C’est important, l’ail. Dans la cuisine soudanaise, on utilise l’oignon pour épaissir les sauces, en France vous prenez de la farine.» Il fait dorer les légumes dans la poêle, sort de l’aneth du congélateur. Dans deux jours, Ayman s’envolera pour Khartoum, où il va retrouver sa femme et sa mère, qu’il aimerait faire venir en France. «Il est complètement éligible au regroupement familial», explique Sonia Cautain, qui le soutient dans ses démarches. «Je vais ramener des épices et des mangues du Soudan», sourit Ayman.

On parle de poivrons farcis, de koftes, ces pépites orientales de viande hachée, tandis qu’il fait revenir des blancs de poulet. Il aime cuisiner l’agneau avec des mirabelles, le bœuf bourguignon, fait goûter sa purée qu’il parfume avec de l’ail et la coriandre. Il montre sa sauce meurette qui réchauffe doucement tandis qu’il annonce le menu du soir à Océane, la jeune serveuse : «Blancs de poulet, sauce tomate, beurre de cacahuète.» «J’ai oublié où était le "h" dans "cacahuète"!» s’exclame Océane.

«Menaces de mort»

Dans ce ballet tranquille qu’est la cuisine d’Ayman, il y a ses gestes d’ici et d’ailleurs. Le voilà qui prépare un bassima, un gâteau d’origine égyptienne. Il mélange la polenta, la noix de coco râpée, du beurre, des yaourts, de la crème, des œufs, et confectionne un sirop de sucre avec un bâton de cannelle, du jus de citron vert et des graines de cardamome. Il a une fierté pudique à expliquer sa recette. La cuisine embaume un peu du destin de cet homme, passé de l’Erythrée et du Soudan à cette France des chefs-lieux de canton et des ronds-points où, chacun à leur façon, des gilets jaunes et des cafés du Nord revendiquent une autre vie que celle qui gravite autour de la pompe à essence, du supermarché et des fins de mois intenables.

En août, sous le titre «Ces restaurants qui embauchent des réfugiés», le quotidien bourguignon le Bien public relatait «la ténacité et la joie de vivre» du café du Nord, mais aussi d’autres embauches de réfugiés dans un restaurant de Montbard et au McDonald’s de Pouilly-en-Auxois. «A la suite de cet article, nous avons reçu des mails d’injures et des lettres de menaces de mort, affirme Sonia Cautain. On a déposé plainte à la gendarmerie d’Arnay-le-Duc. On a eu droit aussi sur Internet à des commentaires comme "Bravo d’engager des envahisseurs", "Votre restaurant va devenir la cantine des traîtres". Il y a aussi des gens qui nous ont accusés d’être des esclavagistes, des négriers des temps modernes. On était surpris, énervés par ces réactions, mais en même temps soulagé qu’Ayman ne soit pas directement attaqués. Je crois aussi qu’on s’en est pris à moi parce que je suis une femme.» Parfois, raconte Sonia Cautain, des clients lui chuchotent : «C’est super ce que vous faites. Des gens modestes, pas des bobos, des intellos comme l’imaginent nos détracteurs.»

Quand il n’est pas aux fourneaux, Ayman vit désormais à Dijon, où il loue un appartement, bûche son français et son dossier de validation des acquis de l’expérience (VAE) dans le but d’obtenir son CAP de cuisine.

Avant de quitter le café du Nord, on s’attarde sur l’exposition qu’il accueille dans l’ancienne salle de bal, à l’occasion du centenaire de l’armistice de la Première Guerre mondiale. Il s’agit des portraits du peintre suisse Eugène Burnand (1850-1921) représentant des soldats de 14 nations alliées : spahi algérien, tirailleur tonkinois, sous-officier écossais, infirmière américaine, poilu français témoignent de cette diversité trop souvent oubliée des peuples engagés dans la boucherie mondialisée. Ayman est en plein service. On n’ose plus le déranger, mais on goûterait bien le bassima dont le moule trône près du comptoir. Problème : il n’en reste plus une miette.

Café du Nord 12, place Bonaventure des Périers, 21230 Arnay-le-Duc. www.cafedunord.eu ou 03 80 64 10 50

Jacky Durand Envoyé spécial à Arnay-le-Duc (Côte-d’Or)

Emprunté sur le site de Libé.

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Re: Cuisines du monde

Message par plumee » 17 déc. 2018, 06:37

:P pour le café du Nord et :evil: pour certaines réactions dont je me demande si je vais pouvoir en supporter encore longtemps l'existence…

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Re: Cuisines du monde

Message par Marie_May » 17 déc. 2018, 12:10

Dommage que ce soit si loin.

Notre Bangladais d'Entraygues est sans papiers. Sa femme, ses filles et sa belle-mère en ont. Mais lui ne peut pas travailler officiellement. Dommage, il est cuisinier. (mais je sais qu'il travaille parfois au noir dans les restaus parisiens avec des compatriotes; ici ce serait plus difficile, même si les gendarmes le laissent tranquille.)
Ce qui m'étonne c'est que Ayman puisse retourner sans danger au Soudan pour voir sa famille. C'est sans doute en Erythrée qu'il ne peut plus rentrer.

Claude
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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 29 août 2022, 22:44

Pour les moutardophiles privés de leur péché mignon, une alternative
fabriquée à partir des graines de néré.
.
Article du Monde.
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Re: Cuisines du monde

Message par plumee » 30 août 2022, 08:24

ET hop! Un ingrédient exotique de plus!

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Re: Cuisines du monde

Message par Chichinette 11 » 30 août 2022, 18:29

En parlant de moutarde.

Ce midi nous sommes allés déjeuner dans un petit restau qu'on connaît bien et en plat du jour il y avait rôti de porc sauce moutarde.
Étonnée, j'ai demandé au serveur s'ils n'avaient pas de problème pour trouver de la moutarde et là, il m'a répondu : "on va en Espagne". Les gens d'ici ont l'habitude d'aller à La Jonquera ou au Perthus pour faire leurs courses, il faut compter 55 minutes d'autoroute entre Narbonne et la frontière en temps normal.
Mais en fait, il n'y a pas que les particuliers, les restaurateurs aussi et le serveur nous a dit qu'en Espagne, il n'y a pas de pénurie de moutarde :o

Alors ? Crise organisée exprès ? Suis pourtant tout sauf parano, mais là ...

Lu sur un autre forum, je suppose que c'est un vrai article :
Source : Canard Enchaîné du 10/08/2022
‌Les crises peuvent parfois être utiles.
Ainsi la crise de la moutarde met un coup de projecteur sur ce condiment.
On apprend que la moutarde de Dijon AMORA et la moutarde MAILLE, qui se voudrait plus qualitative, appartiennent en fait au même groupe agroindustriel, le néerlando-britannique UNILEVER...
Même produit dans un pot différent mais l'un plus cher que l'autre ?
Pour l'amour du goût ?
90 % de cette moutarde est fabriquée avec des graines essentiellement canadiennes !
Et que sont devenus nos producteurs français bourguignons ?
Ben comme la graine de moutarde n'est pas éligible aux subventions agricoles européennes, ils l'ont remplacé par le colza et le tournesol.
Voilà comment une décision politique transforme un pays autosuffisant en un pays dépendant.
La moutarde n'est, encore après tant d'autres, qu'un exemple de ce que la corruption à un très haut niveau (lobbyistes et élus vénaux, on parle de vous !) est capable d'engendrer.
Heureusement, certains encore se battent ( je pense notamment aux producteurs de lavande) pour maintenir des produits de qualité et dont la première qualité est leur proche localisation.
Ainsi concernant la moutarde on peut acheter de la moutarde "française" qui est IGP (Indication Géographique Protégée) en lisant tout simplement sur l'étiquette "Moutarde de Bourgogne", indication qui garantit une fabrication avec des graines locales françaises.
Donc MAILLE et AMORA basta !
On finit le pot et on change de crèmerie !
Merci la crise !
C'est nous les consommateurs qui avons le pouvoir, il ne faut pas l'oublier !

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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 30 août 2022, 20:45

?

Manque de précision. La marque vendue en Espagne n’est pas précisée.
Le mot « corruption » est probablement abusif. ;)

.

Cet été, dans une grande surface de quartier, j’ai vu disparaître les boites de levure de bière :evil:
dont j’assaisonne beaucoup de mes plats. Je n’ai pas d’explication.

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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 30 août 2022, 21:32

L’équipe de CheckNews s’était emparé de ce sujet (et de celui des bouteilles d’huile)
et publiait son analyse il y a 3 semaines après une enquête visiblement plus complète.

La moutarde de Dijon prisée en France ne l’est pas autant ailleurs. Il y a moutarde et moutarde …… De plus les capacités des pots diffèrent …… entre les marchés nationaux.

Pour les moutardophiles, j’ai surligné en rouge ce qui concerne la moutarde mais tout l’article est intéressant.

:roll: Pénurie: trouve-t-on :P de la moutarde et de l’huile de tournesol moins chères à l’étranger qu’en France?


Sur les réseaux sociaux, des consommateurs font état de rayons garnis d’huile et de moutarde en Espagne ou au Portugal, à des prix jugés inférieurs à ceux pratiqués en France.

…… publié le 6 août 2022 à 9h50 (mis à jour le 9 août 2022 à 12h33)



«Actuellement en vacances en Espagne. Les rayons sont pleins de moutarde, elle n’est pas chère et, cerise sur le gâteau, elle vient de France ! «  alerte un internaute sur Facebook. Un second ne cache pas son étonnement face au rayon d’huiles dans des supermarchés du Portugal : «J‘arrive en juillet au Portugal et là, surprise ! Tous les magasins Leclerc et Auchan sont blindés d’huile de tournesol française à 2€ la bouteille.» Ces publications, accompagnées de photos et de vidéos, sont devenues virales sur les réseaux sociaux.

Alors comment expliquer que nos voisins européens ont des stocks d’huile de tournesol et de moutarde de Dijon dans leurs rayons, alors que la France connaît des ruptures de stock depuis plusieurs mois ?


Le tournesol de retour dans les rayons

Comme nous l’expliquions dans un précédent article sur le sujet, l’Ukraine étant le premier exportateur mondial de tournesol, l’invasion du pays par la Russie a considérablement ralenti l’approvisionnement mondial ces derniers mois. «Le conflit ayant débuté fin février, les expéditions ukrainiennes d’huile de tournesol – qui représentent près de 50 % des exportations mondiales – se sont pratiquement arrêtées en raison des goulots d’étranglement logistiques induits par le conflit dans les installations portuaires et n’ont pu reprendre récemment qu’à un niveau minimal, par camion ou par train, via les pays voisins», indiquait l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), auprès de CheckNews, en mai.

En France, cela s’est traduit par une forte hausse des achats d’huile dès le mois de février, les consommateurs voulant vraisemblablement constituer des stocks. Selon les données de l’IRI (Information resources, Inc.), qui réalise des études sur la consommation des ménages, sur la période allant de janvier à juin 2022, les ventes en volume ont augmenté de 16,3 %, comparées à l’année précédente. Avec un pic à 64,4 % en mars.

………

Cette hausse de la consommation a aussi été constatée dans plusieurs pays européens. CheckNews avait notamment obtenu les chiffres de la disponibilité du produit en Espagne, en baisse de 20 points entre fin février et fin mars, selon l’analyste NielsenI Q. Sur la même période, d’autres pays signalaient également des difficultés à fournir les clients, en témoignent des articles de la presse locale, en Allemagne, au Royaume-Uni ou encore en Belgique.

Néanmoins, dès le mois d’avril, la disponibilité du produit revenait progressivement à la normale, comme le constatait l’association européenne des industriels d’huiles végétales (Fediol) dans un communiqué publié le 4 mai à propos du marché européen : «Si la situation du marché de l’huile de tournesol était plutôt tendue au début de la guerre lancée par la Russie en Ukraine, déclenchant des achats de panique dans toute la chaîne jusqu’au consommateur final, la situation s’est améliorée au cours des dernières semaines.» Auprès de CheckNews, le syndicat européen précisait également en mai dernier que, «selon [leurs] entreprises membres, l’huile végétale est disponible et en stock sous forme de bouteilles mais aussi pour les activités commerciales». En France aussi, les stocks d’huile reprennent donc progressivement des couleurs. Alors que le taux de disponibilité en valeur était de 74 % fin mai (au plus bas depuis février), il était déjà de 83,6 % fin juin, selon l‘analyste Nielsen Q.

Une moutarde pas si populaire au-delà de nos frontières

Quid de la moutarde ? Contrairement aux ruptures de stock d’huile de tournesol, qui ont été soudaines à la suite du conflit en Ukraine, la diminution de l’approvisionnement de moutarde était annoncée par les producteurs de moutardes de Dijon dès décembre dernier, comme l’expliquait Libération. Le Canada, premier cultivateur et exportateur mondial, a connu de fortes sécheresses au cours de l’été 2021, ce qui a considérablement réduit sa production. Une large partie des espaces cultivés ont été ravagés et non renouvelés après cet épisode climatique.

«Depuis cinq ans, nous enregistrons une baisse de la productivité de près de 50 %. Aujourd’hui, nous fournissons aux industriels français tout ce que nous pouvons en quantité, sans avoir de stock», détaillait Fabrice Genin, président de l’Association des producteurs de graines de moutarde de Bourgogne (APGMB), auprès de CheckNews. Les producteurs français rencontrent ainsi des difficultés pour s’approvisionner en graines de moutarde et peinent à alimenter les rayons des distributeurs.

Si les consommateurs français en visite chez nos voisins européens s’étonnent de trouver le condiment en rayons, c’est que la moutarde de Dijon n’est pas aussi populaire au-delà de l’Hexagone. «En France on consomme quasi exclusivement de la moutarde de Dijon, alors que nos voisins européens lui préfèrent d’autres moutardes. On a, de fait, une rotation plus faible du produit dans les rayons des supermarchés étrangers», analyse Luc Vandermaesen, directeur général de Reine de Dijon et président de l’Association des moutardes de Bourgogne.

Le producteur explique qu’il a d’ailleurs réduit ses exportations face à la baisse des stocks sur le marché français, dont l’entreprise fait sa priorité : «Plus de 50 % de notre production était vouée à l’exportation jusqu’à il y a un an environ. Aujourd’hui on est passé en dessous des 50 %, car on a beaucoup de demandes venant de la France et nous satisfaisons nos clients historiques en priorité». Luc Vandermaesen précise également que pour l’export, «il n’y a pas eu d’évolution forte de la demande ces derniers mois». Voire pas de demande supplémentaire du tout.

Depuis mi-juillet, la moutarde retrouve aussi très progressivement sa place dans les rayons des hypers et supermarchés français. Ainsi, le taux de disponibilité était de 71,7 %, à la fin du mois de juin, après avoir atteint son plus bas niveau quelques semaines auparavant (56,8 % au début du mois de juin), selon les chiffres de l’analyste Nielsen Q, communiqué à CheckNews.

L’envolée des prix d’un pays à l’autre

Si les produits reviennent progressivement, leurs prix ont fortement augmenté ces derniers mois. L’IRI enregistre en France une hausse de 14,54 % du prix des huiles végétales, entre juillet 2021 et juillet 2022. Même schéma pour la moutarde, avec +13,57 % en un an. Mais cette augmentation des prix est-elle visible uniquement en France ? Des internautes s’interrogent en effet sur le prix moins élevé de la moutarde et de l’huile de tournesol dans certains pays européens, comme l’Espagne et le Portugal.

Concernant la moutarde, Luc Vandermaesen explique ces disparités entre les pays par la différence des quantités vendues à l’export : «Ce sont souvent des flacons de 200 g qui sont vendus à l’étranger sous les marques de distributeurs, alors qu’en France ces pots font souvent entre 370 g et 470 g. Les prix affichés sur les photos ou vidéos prises chez nos voisins sont donc de fait moins élevés, car ce n’est pas la même quantité de produit.» La moutarde de Dijon étant également moins prisée, les stocks s’écoulent moins vite à l’étranger, qu’en France, limitant du même coup les hausses de prix décidés par certains revendeurs.

«S’il y a moins de tension sur le marché, comme c’est le cas pour la moutarde de Dijon, qui est moins consommée chez nos voisins, les prix augmentent significativement moins. La demande a un fort impact sur les prix, tout dépend donc des habitudes de consommation»,
détaille Emmanuelle Auriol, professeure à la Toulouse School of Economics.

Pour l’huile de tournesol, la question se pose différemment, car la consommation est sensiblement la même dans les deux pays. D’autant plus que les prix des condiments connaissent aussi une très forte hausse en Espagne et au Portugal. Selon le dernier rapport de la Commission européenne sur les prix des produits agricoles et des denrées alimentaires, publié le 22 juillet, le prix des huiles et des graisses a augmenté significativement de 37 % entre juin 2021 et juin 2022 en Espagne, et 42,6 % au Portugal sur la même période. En comparaison, le prix de ces produits est en hausse de 17,7 % en France, l’un des taux d’augmentation les plus faibles des 27, derrière le Luxembourg (13,3 %), la Finlande (14,2 %) et l’Irlande (4,8 %). Alors comment expliquer que les prix soient plus faibles en Espagne, comme le suggère cette vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux ?


Selon l’économiste Emmanuelle Auriol, cette vidéo, parmi d’autres, correspond a un instant T. «Si les stocks étaient à un moment plus importants et devaient être écoulés dans un supermarché, il est possible que les prix soient baissés occasionnellement, précise-t-elle. Tout dépend du supermarché, de la date d’achat et des stocks disponibles». Dès lors, il n’est pas possible de faire une généralité à partir d’une simple photographie. Certains internautes témoignent d’ailleurs d’une situation inverse…… «Incursion en Espagne, presque pas de moutarde ou hors de prix et en petits pots. L’huile très chère», constate l’un d’eux sur Twitter, le 8 août.

Enfin, une dernière dimension doit être prise en compte : les coûts de distribution (ensemble des charges nécessaires à la diffusion et la vente d’un produit, telles que la gestion des stocks et les frais de logistique), propres à chaque pays. «Les prix revendeurs sont fixés en fonction de la demande, mais également des marges des supermarchés et des coûts de distribution, telles que la main-d’œuvre. Or, les charges ne sont pas les mêmes en Espagne et en France, où les coûts de logistique sont nettement supérieurs», précise Emmanuelle Auriol.

D’après des données publiées par Eurostat, en 2020, et relayées par 60 millions de consommateurs, les prix des denrées alimentaires étaient ainsi, en moyenne, 15 % plus élevés en France que la moyenne de l’UE
.

plumee
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Re: Cuisines du monde

Message par plumee » 31 août 2022, 17:44

Je n'utilise plus la moutarde que pour la marinade du lapin.
Donc, je verras à ce moment là.
Plus de sauce vinaigrette moutardée classique: j'ai un petit panier rond à assaisonnement avec, en base.
huile d'olive, vinaigre de cidre, sel nature et sel aux herbes, poivre.
Je pose le panier sur la table et chacun assaisonne ses crudités "à la sauvage" comme dit Copinette,
ou "à l'espagnole", comme je dis moi.
Je n'aime plus la moutarde en accompagnement avec de la viande froide, je lui préfère les concombres
à l'aigre-doux.
Je vais réfléchir à faire du lapin à la moutarde sans moutarde. :lol:
Au passage, je vous signale qu'un jour, j'ai remplacé la crème fraîche à laquelle je n'ai plus droit :?
par de la crème de coco et que c'était absolument divin.

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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 01 sept. 2022, 16:13

Encore des vides au rayon moutarde de mon intermachin. Toujours pas les marques « classiques », celles que je connais depuis des années. C’était ce matin. J’ai photographié tous les pots qui comportent le mot « moutarde » sur l’étiquette.

Mis à part, celui de moutarde à l’ancienne Maille (seule survivante des années passées), tous les autres pots me paraissent étranges comme si je n’avais pas connaissance de leur existence avant l’épisode actuel. Le commerçant a trouvé de nouvelles sources d’approvisionnement, et aligne donc 3 moutardes différentes dont un pot tout petit (200 g). Quelque chose me dit que ces moutardes étaient pour l’exportation…… mais sont restées dans le matché hexagonal.
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PatriciAndree
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Re: Cuisines du monde

Message par PatriciAndree » 03 sept. 2022, 16:10

J'ai trouvé de la moutarde en tube hier. Ca ma fait un peu bizarre, nous ne l'avons pas encore goûtée donc nous ne savons pas si elle a le même goût que celle en pot. j'ignore où elle a été produite, il y a une étiquette collée sur les indications d'origines (composition etc)

Claude
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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 03 sept. 2022, 17:45

La colle des étiquettes se délite facilement avec de l’huile alimentaire !

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Re: Cuisines du monde

Message par Chichinette 11 » 03 sept. 2022, 18:53

Là où nous faisons les courses, après plusieurs mois avec des rayons moutarde absolument vides, il y a eu un arrivage de pots, tous identiques, fabrication en Roumanie. Nous économisons la moutarde qui nous restait et ne l'avons donc pas encore goûtée mais il est indiqué qu'il y a de l'édulcorant dedans :?: Me demande quel goût elle aura.

Nous n'aimons la vinaigrette qu'avec de la moutarde et Chichinet, étant de nature carnivore, en consomme pas mal avec de la viande.

Claude
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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 04 sept. 2022, 08:52

Chichi, j’ai qq graines de moutarde à semer. Chichinet pourrait essayer de la faire pousser. En voulez-vous ?

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Re: Cuisines du monde

Message par Chichinette 11 » 04 sept. 2022, 10:06

:lol: Tu es un amour mais si moi qui aimais tant jardiner j'ai baissé les bras, ce n'est pas Chichinet que ça n'a jamais intéressé qui va s'y mettre. Merci quand même.

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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 04 sept. 2022, 14:09

Dis-lui qu’il peut se fabriquer sa propre moutarde.

:lol:

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Re: Cuisines du monde

Message par Marie_May » 13 sept. 2022, 18:45

J'ai trouvé de la moutarde tchèque avant que Maille ne se réapprovisionne je ne sais où. Elle est de retour chez mon épicier du coin.

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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 15 sept. 2022, 15:11

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Une nouvelle moutarde (dite « douce ») …… et toujours l’affiche de restriction.
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Re: Cuisines du monde

Message par Claude » 17 sept. 2022, 22:35

…… Le retour de la moutarde tarde.
Mais les nouvelles sont bonnes tant en matière de récolte des graines brunes (celle de la moutarde de Dijon) au Canada et en France, que celle de la relocalisation de la culture de cette matière première si précieuse pour les palais.

Les détails : https://www.lemonde.fr/economie/article ... _3234.html

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