serres maison
Posté : 23 nov. 2015, 18:27
Au sujet de la serre maison dont je cause dans mon Jardingo et pour laquelle on me réclame des précisions, je mets ici l'article que j'avais écrit pour la feue Gazette jardinière. Désolée, c'est long mais je n'ai pas le courage d'en extirper la substantifique mœlle.
Comme ça, vous saurez tout!
Je voulais vous mettre le numéro du journal et les photos que j'ai oubliés mais mon ordi refuse de lire ENCORE le même CD. :evil:
Têtre à un autre moment? :mrgreen:
Une histoire de serre
Texte et photos de l'auteur
Il y a quelques années, afin de me lancer dans le semis des tomates dont je savais qu’elles auraient du mal à prospérer dans une maison suffisamment éclairée pour moi mais pas pour elles, je commençai à envisager l’éventualité d’une petite serre froide pour qu’elles vivent lumineusement leur enfance.
Avec mon compagnon, nous avons donc couru les jardineries et reluqué les catalogues. Comme d’habitude, celles qui me faisaient de l’œil et semblaient convenir à mes besoins, et à notre pays venté, avaient comme un gros défaut sur l’étiquette. Aussi, mon compagnon décida de se lancer dans une de ces aventures dont il est friand : le bricoli-bricola avec des idées de génie et les moyens du bord (voir déjà « la charrette », Gazette n° 73).
Nous décidâmes d’adosser la serre contre le mur sud en pierre de ma maison, afin de stocker la chaleur de la journée. Logique non ? La fabrication alla bon train. L’utilisation fut moins évidente. Déjà la fermeture n’était pas des plus pratiques. Le superbe rideau à douche (de récup, orné d’un immense bonhomme noir, genre Folon) qui en faisait office, était agrafé sur la planche du haut de la façade et lesté par enroulement sur une barre de fer. Il fallait le ceinturer de deux ficelles + tendeurs à cause du vent, et même le caler au bas avec un bout de madrier. Et puis, surtout, émoustillés par l’aventure, nous avions tous deux zappé – même la jardinière expérimentée que j’étais censée être – que, vu la configuration des bâtiments, la serre serait à l’ombre dès le milieu de l’après-midi. Je devais donc, après la sieste, sortir toutes mes caissettes de la serre, les transporter de l’autre côté de la cour, par terre, et les rapatrier le soir. Quand il s’agissait de quelques-unes ça allait, mais quand il y en eut une douzaine après les repiquages en godets, bonjour !
De plus, dans un pays au climat aussi contrasté que le nôtre, quand on peut avoir, mi-mai, l’hiver givrant au lever du soleil et l’été à midi, soit plus de 20° d’écart, maintenir une température relativement constante dans la serre relevait du bagne. Mon compagnon avait pourtant prévu un aménagement ingénieux en installant au sommet du toit de la serre, une planche qui pouvait basculer. Tenue par une longue charnière en pneu, elle se manœuvrait d’une pichenette. Dès que le soleil émergeait, je courais ouvrir le volet ; dès qu’il se cachait, je courais le fermer (le volet). Parfois, j’oubliais. Quand je réagissais, la serre était une étuve ou une chambre froide. Une année, au vu des températures nocturnes très basses, chaque soir, je recouvrais la serre d’une couverture de laine. Une de ces fameuses nuits de début mai, il y eut de la glace dans la gamelle du chien et 4°C sous la couette. Il faut croire que la tomate a de la ressource, ou bien qu’elle obéit à la loi naturelle « Ce qui ne tue pas renforce », car, au bout du compte, les plants et la récolte furent magnifiques. C’était dans le temps, avant les aléas climatiques. Je ne m’étalerai pas sur les opportunités d’aiguisage de griffes que représentaient pour nos chatons, les parois de côté en plastique souple. On essaya de parer au jeu en les consolidant avec des traverses en vieille frisette vernie… qui coupaient une partie de la lumière.
Au bout de deux ou trois années de ce manège compliqué et fatigant, je finis par découvrir (on ne rit pas) que l’espace le plus longuement ensoleillé de mon terrain se situait à quelque 20 m, presque en face de ma porte d’entrée, et qu’il me suffisait de sortir mes cagettes le matin sur le talus et les rentrer le soir, en début de saison, puis ensuite, la nuit, leur poser simplement par-dessus un plastique arrimé par des pierres. En plus, je pouvais suivre la course de Sieur Soleil depuis ma porte vitrée. Que de temps pour découvrir LA Solution ! Toujours dans la cour, la serre finit par servir d’entrepôt à du petit-bois l’hiver et, à la belle saison, de canapé pour chats siesteux. J’irai même jusqu’à y installer des “nichachats” : deux cartons emboîtés l’un dans l’autre et douillettement isolés et fourrés de paille, pour leur permettre de siester en intersaison, sans craindre les friselis frisquets du pays. Certaines iront même jusqu’à y dépoter leurs petiots. Jusqu’au jour où je commence à penser qu’une serre qui ne sert pas de serre, à quoi ça sert ? Pourquoi ne pas l’installer à l’endroit hyper ensoleillé ? En aplanissant un peu… Ah mais, en voilà une idée qu’elle est bonne ! Sauf que faire tenir debout une serre plus haute que profonde et hyper légère, ça n’allait pas être de la tarte. « Il faut faire un mur en dur contre lequel l’adosser », dit mon compagnon. Et si ce mur pouvait être aussi le plus récupérateur de chaleur possible, qu’est-ce que ce serait bien ! Donc attendre que le dit compagnon soit inspiré et disponible. Ne sachant pas d’avance si cette idée serait aussi géniale une fois réalisée, ça m’ennuyait qu’on construise en dur dans le très joli petit espace envisagé. Bref, laissons mûrir.
En été 2007, prise d’une frénésie de rangement et de réorganisation, la serre dans notre jolie cour devient une épine dans mon œil. Surtout que les nichachats, qui avaient bénéficié entre-temps d’un plan de réhabilitation par isolation extérieure avec de la vieille moquette, commençaient à avoir un look bien fatigué. En attendant un plan sérieux de montage dans mon petit coin ensoleillé, on la débarrasse et on la transporte contre le mur nord de la maison de mon compagnon, pour devenir une réserve à petit-bois pour l’hiver prochain. Au bout de quelque temps, on est d’accord que, sur ce grand mur quasiment aveugle elle fait vraiment nunuche. Qu’à cela ne tienne : elle ira contre mon mur nord à moi, plus intime, juste à l’endroit où mes boutures en pot hivernent. On l’installe et j’y place tous mes pots (une quinzaine). Qu’est-ce que c’est net ! Pour m’apercevoir au bout de plusieurs jours qu’ils ne seront jamais arrosés par la pluie. Déjà qu’elle se fait rare. Mais par contre, placés en hauteur, ils seront bien exposés au Mistral.
Donc, je ressors mes pots que je replace à terre et, avec Justine, une jeune amie aussi passionnément bricolette que moi, nous nous lançons dans l’installation au bon endroit, façon nénettes qui ne doutent de rien. Et là, nouvelle idée géniale ! Et si on faisait un mur en bidons pleins d’eau ? Justement, il en traîne qui ont contenu du pétrole (oui ! oui ! même chez des écolos, on en trouve) et dont on n’est pas arrivé à se débarrasser (ça peut servir). Allez zou, on s’y met. Petite tranchée pour les fondations. Nous partons à la chasse aux bidons stockés en plusieurs endroits et les remplissons d’eau aux 2/3 (on a pensé à la dilatation glaciaire, wouaouh !). Juste le nombre ! Signe du destin. Nous décidons de les solidariser par une tripotée de ficelles bleues récupérées des bottes de paille. Mon maçon, perché sur le toit, nous jette en biais des yeux surpris et dubitatifs mais intéressés ; en tout cas, discrets et polis. Faut dire qu’arrimer cinq rangées de bidons en plastique de 20 litres, même pas rigoureusement semblables, c’est pas de la tarte.
On a bien bataillé et fini par appuyer le tout contre de gros piquets, plantés à la grosse barre à mine dans un sol très caillouteux. Une têtue ça s’entête, mais alors, deux… On solidifie par des traverses, le tout attaché à l’ensemble bidonneux avec encore une tripotée de ficelles bleues et voilà. Notre œuvre a tout d’une toile d’araignée. Y’a plus qu’à aller chez Lucien, le voisin agriculteur, pour trouver un vieux bout de bâche noire à ensilage pour recouvrir les bidons. Les chats ? Quoi les chats ???
Pour planquer notre rafistolage à l’arrière, j’envisage un plessis de châtaignier et de noisetier. On n’aura pas le temps de mettre l’idée à exécution. Quelques jours après, indépendamment, Catherine me propose une récup de canisses et le fils de Mick me donne des plaques rigides transparentes… Quand ça veut, ça veut.
Le chantier va rester en plan jusqu’au prochain passage de Justine. On a commencé ensemble, on finira ensemble. En attendant, je plante au bord de la nouvelle petite terrasse quelques plants de muflier et de verveine bonariensis, élégamment disposés en un arrondi artistique dont je suis très fière et que je viens admirer de temps en temps. Pour les déplanter et les mettre en jauge un mois plus tard, ayant réalisé que la terrasse est un peu riquiqui pour mes besoins compulsifs d’air aux entournures, surtout quand je manœuvre des caissettes. Bien sûr, je n’avais pas prévu les reculs écraseurs. Ça tombe bien, le maçon a fait entre-temps un gros tas de gravats ; avec Lionel, on va en profiter pour démolir le talus de grosses pierres et le “remolir” (comme disait mon fils tout petit) un peu plus loin. Je pourrai placer là ma vieille table de jardin qui, les pieds dans l’eau, va faire la nique à la gent gastéropode. Je sens que je vais être comme un coq en plâtre.
Quatre mois plus tard, Justine revient. Comme c’est à l’occasion d’une rencontre jardinière/table ronde sur les expérimentations de BRF/commandes de graines groupée et exposé du projet de jardinerie agro-écolo de Valérie, je suggère à mon compagnon d’en profiter pour embaucher Geo le bricoleur, qui accompagne Modestine, sa jardinière préférée, et de fermer la serre qui est toujours ouverte à tous vents, en prévoyant un système pour arrimer notre plastique noir au fond contre les bidons. Mon « vieux sanglier solitaire » – je le cite – saute illico sur ses outils et, dans la journée qui précède, bat le record du monde de vitesse d’avancement d’un chantier. Bien sûr, le soir, on le trouve effondré dans sa bauge.
Faut dire que son atelier est bien à 40 m du chantier… Le sanglier imaginatif a trouvé sur le champ une solution ingénieuse pour la porte qui nous faisait réfléchir depuis des lustres : elle va pivoter, pouvoir s’arrimer contre le montant mais aussi pouvoir se dégonder très facilement et se stocker juste à côté en faisant la nique au vent. Le lendemain matin, le café à peine avalé, le sanglier règle les dernières finitions. Ouf ! Il a eu chaud. Côté isolation des bidons par l’arrière, Mick va simplement les recouvrir de plaques de plastique noir semi-rigides données par le maçon et, arrimées partout où c’est possible, par agrafage et scotchage. Enfin, “simplement” c’est beaucoup dire, car les deux bricolettes ficelleuses n’ont pas fait dans la simplicité côté conception ! La planquette en canisses aura même un côté un peu de traviole qui, je le sens, va heurter mon regard tous les jours (jusqu’à… ?).
Mon Dieu ! Pas facile d'être à la fois bricolette et perfectionniste. Encore quelques agrafes pour le plastique noir à l’intérieur. Il ne reste plus qu’à couvrir le sol de cailloux et placer les trois étagères de trois planches chacunes largement disjointes. Plus une sage petite inscription pour rappeler à l’ordre la jardinière étourneau en oubli d’arrosage, aération ou fermeture et « semis, semis, vite des semis ! ». D’ailleurs, un de laitue précoce (‘Bon Jardinier’, mmmm… et ‘Reine de Mai’) piaffe déjà sur ma table de jardin depuis trois jours.
On va voir ce qu’on va voir !
Encart
Les “ingrédients” sont de récup
Pour la serre elle-même
• du tuyau pvc de 40 mm de diamètre, coudes, raccords et colle correspondants,
• de la vieille frisette vernie et des vis à agglo pour les fixations,
• des plaques de polycarbonate transparent,
• des planches (volet d’aération, bandeau en haut et en bas, trois étagères de trois planches disjointes chacune),
• une longueur de chambre à air de pneu pour la charnière de la planche d’aération,
• une targette et une petite équerre métallique tordue pour caler la porte en position ouverte.
La récupération de chaleur
• 20 bidons de pétrole aux 2/3 remplis d’eau,
• de la ficelle à botteler pour solidariser les bidons,
• 2 piquets costauds et une planche pour solidariser le mur,
• des plaques de plastique noir semi-rigide (intercalaires de palettes de tuiles),
• 1 panneau de canisses pour esthétiser l’arrière,
• des cailloux pour le sol de la serre.
Seuls les tuyaux et raccords, les coudes, la colle, les vis et l’adhésif d’extérieur (costaud) ont été achetés. Coût modeste.
Comme ça, vous saurez tout!
Je voulais vous mettre le numéro du journal et les photos que j'ai oubliés mais mon ordi refuse de lire ENCORE le même CD. :evil:
Têtre à un autre moment? :mrgreen:
Une histoire de serre
Texte et photos de l'auteur
Il y a quelques années, afin de me lancer dans le semis des tomates dont je savais qu’elles auraient du mal à prospérer dans une maison suffisamment éclairée pour moi mais pas pour elles, je commençai à envisager l’éventualité d’une petite serre froide pour qu’elles vivent lumineusement leur enfance.
Avec mon compagnon, nous avons donc couru les jardineries et reluqué les catalogues. Comme d’habitude, celles qui me faisaient de l’œil et semblaient convenir à mes besoins, et à notre pays venté, avaient comme un gros défaut sur l’étiquette. Aussi, mon compagnon décida de se lancer dans une de ces aventures dont il est friand : le bricoli-bricola avec des idées de génie et les moyens du bord (voir déjà « la charrette », Gazette n° 73).
Nous décidâmes d’adosser la serre contre le mur sud en pierre de ma maison, afin de stocker la chaleur de la journée. Logique non ? La fabrication alla bon train. L’utilisation fut moins évidente. Déjà la fermeture n’était pas des plus pratiques. Le superbe rideau à douche (de récup, orné d’un immense bonhomme noir, genre Folon) qui en faisait office, était agrafé sur la planche du haut de la façade et lesté par enroulement sur une barre de fer. Il fallait le ceinturer de deux ficelles + tendeurs à cause du vent, et même le caler au bas avec un bout de madrier. Et puis, surtout, émoustillés par l’aventure, nous avions tous deux zappé – même la jardinière expérimentée que j’étais censée être – que, vu la configuration des bâtiments, la serre serait à l’ombre dès le milieu de l’après-midi. Je devais donc, après la sieste, sortir toutes mes caissettes de la serre, les transporter de l’autre côté de la cour, par terre, et les rapatrier le soir. Quand il s’agissait de quelques-unes ça allait, mais quand il y en eut une douzaine après les repiquages en godets, bonjour !
De plus, dans un pays au climat aussi contrasté que le nôtre, quand on peut avoir, mi-mai, l’hiver givrant au lever du soleil et l’été à midi, soit plus de 20° d’écart, maintenir une température relativement constante dans la serre relevait du bagne. Mon compagnon avait pourtant prévu un aménagement ingénieux en installant au sommet du toit de la serre, une planche qui pouvait basculer. Tenue par une longue charnière en pneu, elle se manœuvrait d’une pichenette. Dès que le soleil émergeait, je courais ouvrir le volet ; dès qu’il se cachait, je courais le fermer (le volet). Parfois, j’oubliais. Quand je réagissais, la serre était une étuve ou une chambre froide. Une année, au vu des températures nocturnes très basses, chaque soir, je recouvrais la serre d’une couverture de laine. Une de ces fameuses nuits de début mai, il y eut de la glace dans la gamelle du chien et 4°C sous la couette. Il faut croire que la tomate a de la ressource, ou bien qu’elle obéit à la loi naturelle « Ce qui ne tue pas renforce », car, au bout du compte, les plants et la récolte furent magnifiques. C’était dans le temps, avant les aléas climatiques. Je ne m’étalerai pas sur les opportunités d’aiguisage de griffes que représentaient pour nos chatons, les parois de côté en plastique souple. On essaya de parer au jeu en les consolidant avec des traverses en vieille frisette vernie… qui coupaient une partie de la lumière.
Au bout de deux ou trois années de ce manège compliqué et fatigant, je finis par découvrir (on ne rit pas) que l’espace le plus longuement ensoleillé de mon terrain se situait à quelque 20 m, presque en face de ma porte d’entrée, et qu’il me suffisait de sortir mes cagettes le matin sur le talus et les rentrer le soir, en début de saison, puis ensuite, la nuit, leur poser simplement par-dessus un plastique arrimé par des pierres. En plus, je pouvais suivre la course de Sieur Soleil depuis ma porte vitrée. Que de temps pour découvrir LA Solution ! Toujours dans la cour, la serre finit par servir d’entrepôt à du petit-bois l’hiver et, à la belle saison, de canapé pour chats siesteux. J’irai même jusqu’à y installer des “nichachats” : deux cartons emboîtés l’un dans l’autre et douillettement isolés et fourrés de paille, pour leur permettre de siester en intersaison, sans craindre les friselis frisquets du pays. Certaines iront même jusqu’à y dépoter leurs petiots. Jusqu’au jour où je commence à penser qu’une serre qui ne sert pas de serre, à quoi ça sert ? Pourquoi ne pas l’installer à l’endroit hyper ensoleillé ? En aplanissant un peu… Ah mais, en voilà une idée qu’elle est bonne ! Sauf que faire tenir debout une serre plus haute que profonde et hyper légère, ça n’allait pas être de la tarte. « Il faut faire un mur en dur contre lequel l’adosser », dit mon compagnon. Et si ce mur pouvait être aussi le plus récupérateur de chaleur possible, qu’est-ce que ce serait bien ! Donc attendre que le dit compagnon soit inspiré et disponible. Ne sachant pas d’avance si cette idée serait aussi géniale une fois réalisée, ça m’ennuyait qu’on construise en dur dans le très joli petit espace envisagé. Bref, laissons mûrir.
En été 2007, prise d’une frénésie de rangement et de réorganisation, la serre dans notre jolie cour devient une épine dans mon œil. Surtout que les nichachats, qui avaient bénéficié entre-temps d’un plan de réhabilitation par isolation extérieure avec de la vieille moquette, commençaient à avoir un look bien fatigué. En attendant un plan sérieux de montage dans mon petit coin ensoleillé, on la débarrasse et on la transporte contre le mur nord de la maison de mon compagnon, pour devenir une réserve à petit-bois pour l’hiver prochain. Au bout de quelque temps, on est d’accord que, sur ce grand mur quasiment aveugle elle fait vraiment nunuche. Qu’à cela ne tienne : elle ira contre mon mur nord à moi, plus intime, juste à l’endroit où mes boutures en pot hivernent. On l’installe et j’y place tous mes pots (une quinzaine). Qu’est-ce que c’est net ! Pour m’apercevoir au bout de plusieurs jours qu’ils ne seront jamais arrosés par la pluie. Déjà qu’elle se fait rare. Mais par contre, placés en hauteur, ils seront bien exposés au Mistral.
Donc, je ressors mes pots que je replace à terre et, avec Justine, une jeune amie aussi passionnément bricolette que moi, nous nous lançons dans l’installation au bon endroit, façon nénettes qui ne doutent de rien. Et là, nouvelle idée géniale ! Et si on faisait un mur en bidons pleins d’eau ? Justement, il en traîne qui ont contenu du pétrole (oui ! oui ! même chez des écolos, on en trouve) et dont on n’est pas arrivé à se débarrasser (ça peut servir). Allez zou, on s’y met. Petite tranchée pour les fondations. Nous partons à la chasse aux bidons stockés en plusieurs endroits et les remplissons d’eau aux 2/3 (on a pensé à la dilatation glaciaire, wouaouh !). Juste le nombre ! Signe du destin. Nous décidons de les solidariser par une tripotée de ficelles bleues récupérées des bottes de paille. Mon maçon, perché sur le toit, nous jette en biais des yeux surpris et dubitatifs mais intéressés ; en tout cas, discrets et polis. Faut dire qu’arrimer cinq rangées de bidons en plastique de 20 litres, même pas rigoureusement semblables, c’est pas de la tarte.
On a bien bataillé et fini par appuyer le tout contre de gros piquets, plantés à la grosse barre à mine dans un sol très caillouteux. Une têtue ça s’entête, mais alors, deux… On solidifie par des traverses, le tout attaché à l’ensemble bidonneux avec encore une tripotée de ficelles bleues et voilà. Notre œuvre a tout d’une toile d’araignée. Y’a plus qu’à aller chez Lucien, le voisin agriculteur, pour trouver un vieux bout de bâche noire à ensilage pour recouvrir les bidons. Les chats ? Quoi les chats ???
Pour planquer notre rafistolage à l’arrière, j’envisage un plessis de châtaignier et de noisetier. On n’aura pas le temps de mettre l’idée à exécution. Quelques jours après, indépendamment, Catherine me propose une récup de canisses et le fils de Mick me donne des plaques rigides transparentes… Quand ça veut, ça veut.
Le chantier va rester en plan jusqu’au prochain passage de Justine. On a commencé ensemble, on finira ensemble. En attendant, je plante au bord de la nouvelle petite terrasse quelques plants de muflier et de verveine bonariensis, élégamment disposés en un arrondi artistique dont je suis très fière et que je viens admirer de temps en temps. Pour les déplanter et les mettre en jauge un mois plus tard, ayant réalisé que la terrasse est un peu riquiqui pour mes besoins compulsifs d’air aux entournures, surtout quand je manœuvre des caissettes. Bien sûr, je n’avais pas prévu les reculs écraseurs. Ça tombe bien, le maçon a fait entre-temps un gros tas de gravats ; avec Lionel, on va en profiter pour démolir le talus de grosses pierres et le “remolir” (comme disait mon fils tout petit) un peu plus loin. Je pourrai placer là ma vieille table de jardin qui, les pieds dans l’eau, va faire la nique à la gent gastéropode. Je sens que je vais être comme un coq en plâtre.
Quatre mois plus tard, Justine revient. Comme c’est à l’occasion d’une rencontre jardinière/table ronde sur les expérimentations de BRF/commandes de graines groupée et exposé du projet de jardinerie agro-écolo de Valérie, je suggère à mon compagnon d’en profiter pour embaucher Geo le bricoleur, qui accompagne Modestine, sa jardinière préférée, et de fermer la serre qui est toujours ouverte à tous vents, en prévoyant un système pour arrimer notre plastique noir au fond contre les bidons. Mon « vieux sanglier solitaire » – je le cite – saute illico sur ses outils et, dans la journée qui précède, bat le record du monde de vitesse d’avancement d’un chantier. Bien sûr, le soir, on le trouve effondré dans sa bauge.
Faut dire que son atelier est bien à 40 m du chantier… Le sanglier imaginatif a trouvé sur le champ une solution ingénieuse pour la porte qui nous faisait réfléchir depuis des lustres : elle va pivoter, pouvoir s’arrimer contre le montant mais aussi pouvoir se dégonder très facilement et se stocker juste à côté en faisant la nique au vent. Le lendemain matin, le café à peine avalé, le sanglier règle les dernières finitions. Ouf ! Il a eu chaud. Côté isolation des bidons par l’arrière, Mick va simplement les recouvrir de plaques de plastique noir semi-rigides données par le maçon et, arrimées partout où c’est possible, par agrafage et scotchage. Enfin, “simplement” c’est beaucoup dire, car les deux bricolettes ficelleuses n’ont pas fait dans la simplicité côté conception ! La planquette en canisses aura même un côté un peu de traviole qui, je le sens, va heurter mon regard tous les jours (jusqu’à… ?).
Mon Dieu ! Pas facile d'être à la fois bricolette et perfectionniste. Encore quelques agrafes pour le plastique noir à l’intérieur. Il ne reste plus qu’à couvrir le sol de cailloux et placer les trois étagères de trois planches chacunes largement disjointes. Plus une sage petite inscription pour rappeler à l’ordre la jardinière étourneau en oubli d’arrosage, aération ou fermeture et « semis, semis, vite des semis ! ». D’ailleurs, un de laitue précoce (‘Bon Jardinier’, mmmm… et ‘Reine de Mai’) piaffe déjà sur ma table de jardin depuis trois jours.
On va voir ce qu’on va voir !
Encart
Les “ingrédients” sont de récup
Pour la serre elle-même
• du tuyau pvc de 40 mm de diamètre, coudes, raccords et colle correspondants,
• de la vieille frisette vernie et des vis à agglo pour les fixations,
• des plaques de polycarbonate transparent,
• des planches (volet d’aération, bandeau en haut et en bas, trois étagères de trois planches disjointes chacune),
• une longueur de chambre à air de pneu pour la charnière de la planche d’aération,
• une targette et une petite équerre métallique tordue pour caler la porte en position ouverte.
La récupération de chaleur
• 20 bidons de pétrole aux 2/3 remplis d’eau,
• de la ficelle à botteler pour solidariser les bidons,
• 2 piquets costauds et une planche pour solidariser le mur,
• des plaques de plastique noir semi-rigide (intercalaires de palettes de tuiles),
• 1 panneau de canisses pour esthétiser l’arrière,
• des cailloux pour le sol de la serre.
Seuls les tuyaux et raccords, les coudes, la colle, les vis et l’adhésif d’extérieur (costaud) ont été achetés. Coût modeste.